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Tract de la CNT AIT française de 1946, attaque contre la CGT de gouvernement, rappel des luttes urgentes à mener et de la solidarité à exprimer avec la CNT espagnole sous le joug franquiste.
AIT CONFÉDÉRATION NATIONALE DU TRAVAIL CNT
Section Française de l’Association Internationale des Travailleurs
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MANIFESTE
aux TRAVAILLEURS FRANÇAIS- Le Congrès Confédéral de la C.G.T., qui s’est tenu à Paris au début d’avril 1946, a consacré l’asservissement total du Syndicalisme français au Parti Communiste. Désormais, il n’existe plus, dans la C.G.T., ni démocratie syndicale, ni autonomie, ni indépendance.
- La doctrine du syndicalisme est foulée aux pieds, son action de classe organisée est niée, ses principes sont bafoués, son cadre de recrutement de propagande est d’action est complètement déplacé, et son unité n’est possible que dans l’obéissance aux ordres du parti politique victorieux. Les buts poursuivis par le syndicalisme, ses moyens d’action, ses luttes quotidiennes sont remplacés par l’action parlementaire et gouvernementale et celle-ci, pour s’exercer, ne conçoit pas que les travailleurs puissent utiliser une autre action que celle qui est indiquée par le ou les partis au pouvoir.
- En même temps que les corps de doctrine du syndicalisme sont éliminés de la C.G.T., l’action directe, et en premier lieu la grève, qu’on n’ose encore bannir mais qu’on ne tolère déjà plus, est déclarée impropre pour faire aboutir les revendications pourtant si justifiées de tous les travailleurs.
- En un mot, la C.G.T. n’est plus qu’un appendice du pouvoir et un rouage supplémentaire de l’Etat. Naturellement, comme il va de soi, les adversaires de l’écrasante majorité communiste n’ont pas droit à la parole, se voient exclus des syndicats et on peut être certain que cette situation ne fera qu’empirer chaque jour davantage.
- Telle est la situation faite au syndicalisme et aux syndicalistes révolutionnaires dans ce pays où, en dépit de toutes les " garanties " offertes par la Constitution, ils n’ont le droit, ni de s’exprimer par la parole, ni de faire connaître leur pensée écrite, puisqu’on leur refuse systématiquement toute autorisation de faire paraître leurs journaux.
- Pour toutes ces raisons, dont une seule suffirait à déterminer notre décision et à la justifier, les syndicalistes révolutionnaires réunis en Conférence Nationale à Paris, le 4 et 5 mai 1946, ont décidé de quitter la C.G.T. où leur présence ne se justifiait plus et de fonder la CONFEDERATION NATIONALE DU TRAVAIL, pour pouvoir exprimer librement et réaliser le plus rapidement possible les buts poursuivis par le syndicalisme révolutionnaire, en accord et en liaison avec les Centrales Nationales déjà groupées au sein de l’ASSOCIATION INTERNATIONALE DES TRAVAILLEURS, expression suprême du syndicalisme révolutionnaire dans le Monde.
- Dès son origine la CONFEDERATION NATIONALE DU TRAVAIL est certaine d’interpréter vos sentiments intimes en organisant la lutte pour l’aboutissement des revendications en suspens et qui, pour des motifs gouvernementaux et partisans, ont été volontairement abandonnés par le C.G.T., en accord avec ses représentants dans les Conseils de l’Etat.
- Nous nous proposons - et vous proposons donc - de reprendre la lutte pour faire aboutir ces revendications qui, dans l’ordre d’urgence, nous paraissent être les suivantes : L’accroissement du pouvoir d’achat par l’application de l’échelle mobile dans le cadre d’une réforme instituant une monnaie intérieure, le freinage et la stabilisation des prix grâce à l’organisation de la Confédération Générale des consommateurs et du contrôle ouvrier sur la production qui permettront d’établir une parité entre les salaires et les prix ; le respect des conventions collectives antérieures : la révision de toutes
celles qui sont insuffisantes ; la lutte contre le travail aux pièces et au rendement que vingt ans l’action syndicales avaient réussi à faire disparaître ; la défense de la journée de travail de huit heures concédée par Clemenceau en 1919 sous la pression de l’action des travailleurs ; respect de la semaine de quarante heures ; enfin, et surtout, l’attribution aux travailleurs d’un ravitaillement réellement vital, comme le professeur Richet en a reconnu la nécessité dans son rapport à l’Académie de Médecine, et l’élimination du marché noir par la mise à la disposition de consommateurs des produits alimentaires excédentaires exportés actuellement ; lutte contre les prélèvement iniques sur les salaires ; abrogations des lois hitlériennes qui suppriment la liberté de l’embauchage et du débauchage. Telle sont les revendications les plus urgentes pour lesquelles nous faisons appel à votre action et que nous proposons de défendre avec vous et pour vous.
- Nous savons que d’autres, innombrables et aussi justifiées , sollicitent également notre activité et nous ne manquerons pas de nous y intéresser ; mais celles que nous vous indiquons ci-dessus nous paraissent les plus urgentes et les plus indispensables.
- En dehors de cette lutte quotidienne, qui ne peut être qu’une partie de notre tâche la plus immédiate, nous vous demandons de mener avec nous le bon combat nécessaire contre la guerre qui menace à nouveau ; contre le fascisme renaissant ou maintenu en place avec le concours des puissances ex-alliées et de leurs auxiliaires réformistes et bourgeois de tous les pays.
- C’est ainsi qu’en particulier, nous vous demandons de soutenir de toutes vos forces la lutte que mène notre sœur, la CONFEDRATION NATIONALE DU TRAVAIL d’Espagne, contrainte à l’exil par Franco, lequel continue à déshonorer l’Espagne par sa présence et son régime abject, avec la complicité de l’Angleterre et l’Amérique capitalistes.
- Nous sommes certains que vous voudrez prendre votre place dans cette bataille générale contre le fascisme international, dont la presqu’île ibérique et le dernier refuge en Europe ; que vous saurez faire les efforts nécessaires pour que ce but soit atteint promptement et que cesse le martyre du peuple espagnol, réduit à la misère et au silence par Franco depuis près de sept ans.
- Tel est le programme de travail que nous vous proposons aujourd’hui. Nous sommes convaincus qu’il sera le vôtre et que, tous ensemble, nous mettrons tout en œuvre pour le réaliser.
- Que notre syndicalisme révolutionnaire, chassé de la C.G.T. par une majorité de fonctionnaires et de larbins dociles aux ordres d’un parti, trouve asile dans notre C.N.T. et s’épanouisse largement dans les usines, les chantiers, les ateliers, les bureaux et les champs, et que tous, par votre adhésion consciente, raisonnée, ardente, rapide et courageuse, vous lui donniez force, vie et efficacité, afin que se lève sur le monde, le plus tôt possible, l’ère de la société syndicaliste.
- Vive la Confédération Nationale du Travail !
- Vive le Syndicalisme Révolutionnaire !
- Vive l’Association Internationale des Travailleurs !
- La Confédération Nationale du Travail,
- 22, rue Sainte Marthe, 22
- PARIS (1Oe)
- Travailleurs, rejoignez la C. N. T.
- Lisez et diffusez "L’Action
- Syndicaliste " organe de la C.N.T.